Des chercheurs suisses se sont demandés s’il était hygiénique d’utiliser les mêmes machines IRM (Imagerie par Résonance Magnétique) pour les humains et les animaux. L’utilisation de ces machines par les animaux permettrait de faire face au peu d’équipements présents au niveau vétérinaire. Pour étudier l’hygiène, les quantités de bactéries présentes sur les poils de chiens et les poils de barbe ont été comparées. Des prélèvements ont ainsi été réalisés chez trente chiens (de 16 races différentes) et chez 18 humains.
Comment compter les bactéries ?
Des géloses contactes ont été utilisées pour cultiver les bactéries présentes dans les poils. Les géloses sont des milieux de culture contenant de l’agar-agar ainsi que différentes molécules permettant la croissance bactérienne. Les bactéries, déposées à la surface, vont ainsi utiliser les nutriments présent dans ces géloses pour se développer à leur surface. Il est impossible de voir directement une bactérie sur ces géloses car la taille des bactéries est d’environ 1 µm (soit 0,001 mm) ce qui inférieur à ce que l’on peut voir à l’œil nu.
Les bactéries vont se développer à la surface de la gélose tout en restant immobile à l’endroit où la première bactérie a touché la gélose. Il va ainsi se former un “tas” de bactérie appelé colonie qui devient tellement grand qu’il est visible à l’œil nu : quelques mm à quelques cm. Une colonie peut contenir trois milliards de bactéries (Bionumbers). On considère que chaque colonie présente sur la gélose correspond initialement à une bactérie. On utilise le terme UFC (unité formant colonie) qui correspond au nombre initial de bactérie.

En fonction du nombre de colonies sur la gélose il est ainsi possible d’estimer la quantité de bactéries présentes initialement. Cette étude utilise trois catégories pour le dénombrement : faible (0 à 10 UFC), modéré (11 à 30 UFC) et élevé (plus de 30 bactéries).
Combien de bactéries dans une barbe ?
Parmi les prélèvements chez les hommes, la totalité présentait un nombre élevé d’UFC tandis que seulement 23 chiens sur 30 ont un tel niveau. Les autres chiens ayant un nombre modéré d’UFC. Le nombre de bactérie (ou d’UFC) n’est pas un indicateur d’hygiène en soi même. En effet, les bactéries ne sont pas forcément négatives pour la santé humaine. De nombreuses bactéries ayant même un rôle positif. La peau humaine est naturellement recouverte de bactéries qui l’aide à se défendre contre d’autres bactéries nocives.

Les bactéries de la barbe sont-elles dangereuses ?
Deux espèces bactériennes pathogènes (c’est-à-dire capables d’infecter un humain) ont été retrouvées parmi les prélèvements : Enterococcus faecalis dans cinq barbes et Staphylococcus aureus dans deux barbes respectivement. Ces bactéries sont dites pathogène opportuniste car leur présence n’implique par forcément une infection et une maladie. En effet, ces bactéries peuvent être trouvées chez des personnes saines (porteurs sains) et devenir pathogène seulement lorsque les défenses de l’organisme sont affaiblies (coupure, stress, maladie, … ).

La bactérie Staphylococcus aureus (également appelé Staphylocoque doré) est retrouvée chez environ 10 à 20 % des humains au niveau des fosses nasales ou de la gorge. Enterococcus faecalis est retrouvé chez 20 % des humains au niveau de la cavité buccale et chez 80 % des humains au niveau du tube digestif. La présence de ces deux bactéries n’est donc pas surprenante puisqu’elles sont naturellement trouvées chez une partie des humains. Malgré le fait qu’elles soient répandues dans la population ces bactéries peuvent quand même poser des problèmes d’hygiènes dans le cadre de milieu hospitalier où sont présents des personnes avec un système immunitaire affaiblis.
Dans le cadre de cette étude la bactérie Staphylococcus aureus a aussi été trouvée dans les poils d’un chien ainsi qu’une souche d’Enterococcus et deux souches de Moraxella. Le nombre de bactéries pathogènes est donc plus faible chez les chiens (4 / 30) que chez les humains testés (5 / 18). Les auteurs indiquent comme limites à leur étude de ne pas avoir étudié les bactéries présentes sur la peau des femmes et également d’avoir étudié seulement la présence de bactéries et non pas d’autres micro-organismes comme les vers. D’autres limitations pourraient être citées telles que le faible nombre de participants ou la méthode d’étude ne permettant de cultiver qu’une partie limitée des bactéries.
Les résultats de cette étude sont donc à relativiser par rapport à ce que certains médias d’informations indiquent. Le but de l’étude n’étant pas de comparer l’hygiène des animaux de compagnie à celle des humains. Pour répondre à la question initiale, il semblerait que l’utilisation des appareils d’IRM par les animaux ne contamine pas le matériel médical plus que les humains.
Référence de l’étude
Gutzeit, A., Steffen, F., Gutzeit, J., Gutzeit, J., Kos, S., Pfister, S., Berlinger, L., Anderegg, M., Reischauer, C., Funke, I., Froehlich, J., Koh, D., Orasch, C. (2018). Would it be safe to have a dog in the MRI scanner before your own examination ? A multicenter study to establish hygiene facts related to dogs and men. European Radiology. doi:10.1007/s00330-018‑5648‑z (lien)
Bibliographie complémentaire
Horn, J., Stelzner, K., Rudel, T., & Fraunholz, M. (2018). Inside job : Staphylococcus aureus host-pathogen interactions. International Journal of Medical Microbiology, 308(6), 607–624. doi:10.1016/j.ijmm.2017.11.009 (lien)
Kao, P. H. N., & Kline, K. A. (2019). Jekyll and Mr. Hide : How Enterococcus faecalis subverts the host immune response to cause infection. Journal of Molecular Biology. doi:10.1016/j.jmb.2019.05.030 (lien)
Et surtout, 18 individus c’est assez peu pour tirer de grandes conclusions quant à l’hygiène des barbes en général.
D’autant que l’étude de la flore cutanée de l’homme n’était pas le but premier de l’article.
C’est fou qu’un petit papier comme ça ait eu tant de visibilité.